FAUNE

Le caïman gris...
Publié le 7 juillet 2013

Une rencontre venue du fond des âges...

Caïman gris sur la crique Balata, près du camp Cariacou, le 5 juillet 2013
La Nature semble aux aguets, comme s'il s'agissait d'un événement inconnu et nouveau... elle semble retenir son souffle entre les griffes de la nuit agonisante et la promesse du jour à venir. L'aube tel un peintre timide dessine peu à peu les silhouettes sylvestres échevelées penchées vers l'eau noire que rident des bois échoués...

Au détour d'un méandre, un brandon s'est allumé sur l'eau, il glisse dans l'obscurité bruissonnante, suivi de son reflet fidèle. Ma pagaie cachée dans le profond silence de l'eau propulse le canoë vers la bête qui vient de s'immobiliser, attentive à son instinct et à l'environnement qui brusquement a changé autour d'elle...

La silhouette du crocodilien progressivement colore le halo pâle de ma lampe. curieux et méfiant à la fois, le caïman sort de l'eau et de la préhistoire, pour un face à face pacifique et respectueux...

Voilà une journée qui commence bien !...

Les Crocodiliens

Seuls survivants, avec les oiseaux du clade des Archosauriens (Crocodiliens, dinosauriens et Ptérosaures) les crocodiliens apparaissent sur terre au Trias ancien, il y a 250 millions d'années. A l'époque ils sont présents sur toute la surface des terres et des océans.
Particulièrement résistants et adaptés à leur environnement, des espèces de crocodiliens vont traverser les trois dernières grandes extinctions biologiques survenues depuis leur apparition.

Aujourd'hui, leur ordre est représenté par 23 espèces réparties dans 3 familles :
- La famille des crocodylidae ( 4 genres, 13 espèces )
- La famille des gavialidae (1 genre, 2 espèces)
- La famille des alligatoridae (4 genres, 8 espèces)

La répartition géographique est aujourd'hui limitée à la zone intertropicale, sur tous les continents, une seule espèce marine (crocodylus porosus) a survécu jusqu'à nos jours entre l'Australie et le Sud Est asiatique.

Les Alligatoridae

Dans la famille des alligatoridae il fat distinguer deux aires géographique majeures :
L'hémisphère Nord ou vivent 2 espèces appartenant au même genre :
- Le genre alligator avec l'alligator du Mississipi et l'alligator de Chine
L'hémisphère sud où sont répartis exclusivement les 3 autres genres :
- Le genre caïman (caïman crocodilus, caman¨latirostris et caïman yacare)
- le genre melanosuchus (melanosuchus niger)
- le genre paleosuchus (paleosuchus palbebrosus et paleosuchus trigonatus)

Les 8 espèces d'alligatoridae vinant en Amérique du Sud et Amérique centrale sont communément appelés "caïman" nom emprunté à la langue amérindienne caribe.

Le Caïman gris
Caïman gris sur la crique Balata, près du camp Cariacou, le 5 juillet 2013
Les deux espèces de paleosuchus très semblables dans leurs apparences et comportements sont vraisemblablement parmi les plus anciennes espèces de crocodiliens ayant traversé les âges jusqu'à nous (mais réussiront-ils à nous survivre ?)

TAXONOMIE:
Nom scientifique... "paleosuchus triganotus"
Nom français.........."caïman gris" ou "caïman hérissé" ou "caïman de Schneider" 
Nom créole............."caïman à front lisse" (avec le Caïman rouge) ou "caïman roche"
Nom wayampi........"Yakaleti"
Nom sranatongo...."Bergikaaiman"
Nom anglais..........."Schneider's dwarf caïman"

DESCRIPTION:
Le Caïman gris est un petit crocodilien dont la biométrie adulte moyenne se situe entre 1,3 m pour la femelle et 2.3 m pour le mâle. Massif, il est revétu d'un cuir épais et durci muni de plaques osseuses, notamment sur la tête.
Les deux mâchoires sont claires et  tachetés sur leurs côtés. 
Entre les pattes arrières les quatre rangées d'écailles dorsales connaissent un rétrécissement.

RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE :
Le caïman gris est une espèce vivant à proximité des criques (rivières) forestières reculées. pendant la saison des pluies, il peut descendre les cours d'eau jusqu'aux grands fleuves et savanes inondées. 

BIOLOGIE
Solitaire, le caïman gris comme son cousin le caïman rouge vit sur les berges des rivières, caché dans un terrier en journée et à la recherche d'invertébrés et de vertébrés terrestres  et aquatiques pendant la nuit.
Cet alimentation diversifiée l’amène souvent à s'éloigner des berges où il vit et il n'est pas rare de croiser les espèces à front lisse sur les crêtes des collines...

REPRODUCTION
L'accouplement est la seule relation que ce solitaire entretient avec ses congénères. La femelle vient alors pondre dans le sous bois entre 20 et 30 œufs  et près d'une termitière qui lui apporte la chaleur nécessaire à l'incubation qui dure 3 mois (entre 28 et 32°). Les oeufs son répartis de l'intérieur à l'extérieur autour du point des 31° qui détermine le sexe des petits (femelle jusqu'à 31° et mâle au delà)

Contrairement à la plupart des autres espèces de caïmans, la femelle ici reste à surveiller son nid qu'elle vient ouvrir à l'appel des petits juste éclos;  avant de les transporter jusqu'à la rivière parfois éloignée.

PROTECTION
Afin de limiter la pression cynégétique importante à la seule activité d'auto-subsistance, sa chasse commerciale de cette espèce a été interdite. Elle est donc inscrite à l'annexe II de la Convention de Washington (CITES).


Revêtu de l'invisibilité de sa patience, sur la berge, le Caïman se fait roche immobile jusqu'au moment où...
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Le grand Tamanoir
Publié le 20 juin 2013

La grande langue !

Merci à Daniel Bergeron d'avoir fait partagé cette  belle et rare rencontre avec un Grand Tamanoir !


Grand Tamanoir nageant
Le Tamanoir (Myrmecophaga tridactyla), est une des espèces emblématique de la forêt amazonienne, ce mammifère est  le plus grand représentant de la famille des fourmiliers.

Très discret, on le rencontre qu'exceptionnellement malgré une aire géographique étendue, allant des savanes aux forêts tropicales élevées. appartenant à l'un des plus anciens groupes de mammifères de la planète, l'ordre des Édentés xénarthres (qui comprend également les tatous et les moutons paresseux), le grand tamanoir est une espèce qui est en danger d'extinction et est inscrit aujourd'hui sur la liste rouge de l'IUCN . En Guyane, le tamanoir est inscrit à l'article 1 de la convention CITES (Interdit à la chasse, au transport , à la capture et au commerce) depuis le 15 mai 1986.

Description

Tamanoir au zoo de Macouria (Guyane)
Le tamanoir adulte mesure environ 2 mètres pèse entre 20 et 50 kilos. 
Sa silhouette est très caractéristique, car elle dispose à l'arrière d'une grande queue en panache, qui peut atteindre près de 90 cm et lui et de couverture camouflée lorsqu'il dort. A l'avant un très long museau légèrement recourbé à l'intérieur duquel une langue immense d'environ 60 cm.
De couleur beige, sa fourrure est épaisse et longue, munie de poils rêches. Une "gilet" noir frangé de blanc couvre de poitrail et se prolonge sur les flancs.
Ses oreilles sont petites et rondes, comme ses yeux.
Les membres antérieurs sont puissants et dotés de griffes importantes dont la troisième dépasse les 10 cm, ses griffes, en position de repos sont repliées contre la paume la face externe de la main servant d'appui pendant la marche qui et lente et chaloupée. .

Aire géographique et territoire

Présent dans toute l'aire amazonienne, le tamanoir est aussi signalé en Amérique centrale et sur les plaines côtières colombiennes et équatoriennes. Son territoire vital varie selon le biotope où il vit  : limité à 3 km2 en forêt il peut dépasser les 20 km2 dans les savanes.

Biologie

Le tamanoir, animal solitaire est un grand dormeur : il consacre 14 à 16 heures quotidiennes au repos réalisé dans une excavation creusée , c'est un animal diurne mais qui a su s'adapter à l'anthropisation de son biotope, adoptant un mode de vie nocturne pour éviter l'Homme. Silencieux les tamanoirs communiquent grâce aux odeurs (sécrétions et salive) Il peut vivre jusqu'à 25 ans. C'est un animal pacifique qui n'est pas territorial, aucun combat n'a été observé entre mâles ou pour défendre un espace défini.

Le tamanoir a peu de prédateur (à part l'Homme) car sa puissance et ses griffes en font un redoutable adversaire. Partout en, Amazonie, les populations forestières rapportent des description de rencontres accidentelles où le tamanoir debout en appui sur sa queue teint tête même aux grands félins tel le jaguar, et ses griffes acérées restant fermées même après la mort, le combat s'avère parfois mortel pour les deux adversaires.

Alimentation

Si il consomme des plantes, le tamanoir est essentiellement insectivore, les fourmis et les termites constituant ses proies favorites. Il est doté d'un odorat 40 fois plus puissant que celui de l'Homme, et qui lui sert à repérer ses proies dont il éventre les habitats grâce à ses puissantes griffes. Son museau pénètre alors dans les cavités des termitières et des fourmilières attaquées et son immense langue épineuse et à la salive collante fouille et récolte environ 150 insectes par prélèvement. Le tamanoir "grignote" ainsi toute la journée, avalant jusqu'à 30 000 insectes par jour, répartis sur une trentaine de sites différents. certaines espèces de fourmis, très venimeuses ou très agressives échappent à ses attaques.



Reproduction

La reproduction du tamanoir est le seul moment sociable de l'espèce et constitue la fragilité principale de l'espèce, la femelle ne donnant naissance qu'à un seul petit tous les trois ans !. La maturité sexuelle intervient entre 3 et 4 ans et lorsqu'elle est fécondable, la femelle attire le mâle via ses sécrétions odorantes. 
La gestation dure 190 jours, la femelle pour mettre bas se met debout en appui sur sa queue, et donne naissance à un petit de 1,5 kilo environ qui s'accroche à sa fourrure et y reste pendant un an ! Le sevrage intervient entre 6 et 9 mois mais l'indépendance à la mère quà partir de la troisième année.

Histoire

Parmi les voyageurs et les naturalistes qui réalisent les premières descriptions de la faune guyanaise, le chevalier des Marchais s'intéresse tout particulièrement au tamanoir dont il nous fait une description détaillée dans sa relation de voyage publiée en 1731 ("Voyage du chevalier des Marchais en Guinée, isles voisines et à Cayenne, fait en 1725, 1726 et 1727". Amsterdam, 1731 (t. III, p. 231))

Représentation du tamanoir au XVII° siècle
«On appelle à Cayenne Mange-fourmis, dit le chevalier des Marchais, un animal qu'on pourrait nommer renard amériquain, s'il ne se trouvait qu'en Amérique; mais comme il y en a en Afrique, je crois qu'il faut s'en tenir au premier nom, à moins qu'on ne veuille se servir de celui que lui donnent les Indiens, qui est bien long : ils l'appellent Tamadu Guacu ; il signifie la même chose que Mange-fourmis : c'est sa nourriture ordinaire qui lui a fait donner ce nom.

 « Cet animal est long et gros comme un chien de bonne taille. Ses jambes de derrière sont tout d'une venüc comme celles d'un ours : celles de devant sont un peu mains grosses; il a le pied plat, divisé en quatre doigts armez d'ongles longs et forts; ceux de derrière ont cinq doigts et bien armez; sa tète est longue et sort museau encore plus long et pointa ; il a des yeux petits, ronds et noirs, les oreilles fort courtes. Ceux qui ont pris la peine de mesurer sa langue disent qu'elle a deux pieds et quelque­fois davantage de longueur. Il est obligé de la plier pour la cacher dans sa gueule qui, toute longue quelle est, seroit beaucoup trop courte pour cacher ce membre. S'il parlait, il parleroit sans doute beaucoup, et on ne lui reprocheroit pas sans raison qu'il aurait la langue bien longue.

«  Il vit de fourmis. Lorsqu'il en a découvert quelque retraite, il fouille avec ses ongles pour élargir l'entrée et arriver au centre de la fourmilière, et aussitôt il y fourre sa longue langue qui pénètre dans tous les recoins de l'antre, et comme elle est onctueuse, les fourmis effarouchées et en désordre s'y attachent aussitôt, et dès qu'il la sent chargée de ces insectes, il la retire dans sa gueule et les avalle. Il recommence ce manège tant qu'il sent des insectes dans un endroit : après quoi s'il a encore faim il va en chercher un autre. Cette nourriture est légère, comme on voit ; elle ne laisse pas cependant de bien nourrir l'animal qui s'en sert, mais elle donne à sa chair une odeur de fourmis qui n'est pas agréable. Les Indiens et les Nègres en mangent ; mais les Français ont de meilleures viandes. S'ils savoient un peu mieux leurs intérêts, ils conserveroient précieusement ces animaux qui les délivreroient en tout ou en partie des fourmis qui leur causent de très grands dommages. Mes mémoires ne marquent point s'il aime autant les fourmis blanches que noires. On connoit les fourmis blanches sous le nom de Poux de bois : elles en ont assez la figure... Elles sont également malfaisantes partout. Ce seroit un bonheur extrême pour les habitants s'ils étoient délivrez de ces mauvais insectes qui sont encore plus pernicieux que les noirs. Dans ce cas il devrait être sévèrement défendu aux chasseurs de faire aucun mal au Mangefourmis-

« J'ai dit qu'on les pourroit appeler renards : c'est â leur queue qu'ils seraient redevables de cette dénomination. En effet il n'y a point un renard au monde qui ait une queue aussi souple que la leur. Elle a souvent près de deux pieds de longueur elle est presque plate et couverte de tous cotez de grands poils de quinze à vingt pouces de longueur, un peu durs à la vérité' ce qui lui donne assez l'air d'une queue de cheval. Comme elle forte et qu'il lui imprime tel mouvement qu'il lui plait, il balaye les endroits où il passe, et quand il la replie sur son dos, il s'en couvre entièrement. Elle le défend de la pluye qu'il craint beaucoup, c'est pour lui un surtout qui a son agrément et sa commodité. »

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