mercredi 7 août 2013

Le droit à la terre des amérindiens

Brigitte Wyngaarde est une femme exceptionnelle, appartenant à la nation lokono, elle s'est toujours engagée dans la défense des droits et des identités des peuples autochtones de Guyane. Depuis de nombreuses années, elle marque le débat politique régional de sa vision libre et saine, ancrée dans les racines culturelles des territoires naturels de Guyane mais aussi tournée vers l'évolution moderne de la  société et des mentalités. La pertinence de ses idées s'aiguise au fil de ses expériences coutumières et politiques, portées par un courage et un comportement exemplaires.

Brigitte Wyngaarde nous livre ici une analyse courageuse et lucide de la situation des nations amérindiennes de Guyane, communautés "sous influence" menacées de désagrégation et confrontées à la problématique de droit à la terre. La pensée de cette femme de Guyane n'est pas seulement un témoignage et un point de vue politique cohérent, c'est une vision intelligente d'une société possible en Guyane, fidèle au passé et exemple pour l'avenir....

Les peuples autochtones et leurs droits à la terre

par Brigitte Wyngaarde


Source : Blada.com. Le lien ici : Chroniques 2013 de Blada.com


En juin 2013, Brigitte Wyngaarde participait à un colloque organisé par la SOGIP (Scales of Governance the UN and Indigenous Peoples) à Paris sur le thème "Les peuples autochtones et leurs droits à la terre".
Nous publions ici le texte de sa contribution à cette tribune de la Sogip, qui présente un état des lieux de la situation actuelle des peuples autochtones de Guyane. C'est avant tout le point de vue d'une femme moderne et lucide, impliquée dans la société, et très attentive aux valeurs traditionnelles qui sont le socle de nos sociétés. Son analyse est éclairée par une belle série d'expériences formatrices : son expérience de chef coutumier, de gestionnaire de Zone de Droits d’Usages collectifs (à Balaté), et son expérience politique (candidate des Verts aux élections régionales de 2004).



Les diverses sociétés de Guyane


La Guyane française : le littoral et l’arrière pays


La Guyane française est caractérisée, en géographie, par une différence marquée entre le littoral, assez fortement peuplé et urbanisé, et l’intérieur (le Sud), très faiblement peuplé et urbanisé.


La Guyane française : la variété des sociétés

La population actuelle de la Guyane française est d’origine extrêmement variée : on y trouve les amérindiens – la population d’origine, les noirs-marrons issus de la traite et du marronnage, les créoles issus de la traite et de l’esclavage, des ‘blancs métropolitains’, ainsi que des personnes issues d’une immigration plus ou moins récente : hmong, surinamiens, haïtiens et brésiliens. Dans cet amalgame régi par la loi française, la société créole joue, via ses élites, un rôle prépondérant, pour des raisons historiques, ce qui se traduit par une situation de leadership sur le plan politique, économique, culturel, dans le contrôle des médias ou encore pour l’occupation de la terre.


La Guyane française : un département français.

La Guyane est une dépendance administrative de la France. Elle a un statut juridique (sur les plans législatif et réglementaire) très semblable à celui des cent autres départements français.


La Guyane française : les communautés traditionnelles

Les sociétés communautaires de Guyane comptent les noirs-marrons (essentiellement Saramacca, Boni et Ndjuka) et les amérindiens (Kalina, Lokono, Palikour sur le littoral, Wayana, Emerillons et Wayampi dans le Sud du pays. La population amérindienne autochtone constitue une faible part (5 %) de la population guyanaise.


Les communautés amérindiennes autochtones :
un village sur une terre collective

En Guyane française, les communautés autochtones sont organisées selon un modèle social semblable à ce que l’on observe dans les autres régions d’Amérique du Sud : l’occupation d’une terre collective. Les villages sont placés sous la responsabilité d’un chef coutumier.

Sur le périmètre du village, l’espace ne fait pas l’objet d’appropriation individuelle (pas de titre individuel de propriété). L’implantation se fait sur la base du rapprochement par famille, les délimitations sont réduites au minimum (plantations florales, petites haies) ; il existe une certaine intimité familiale, mais il n’y a pas de clôture et chacun se déplace librement sur l’espace collectif.

L’établissement est en principe réservé aux membres de la communauté. Cependant les villages accueillent de plus en plus de personnes exogènes, et la mixité qui en résulte est de plus en plus marquée.

Cette organisation confère au village un caractère ‘ouvert’; cela facilite une certaine convivialité et un certain esprit relationnel.

Cependant les villages ont longtemps souffert d’un enfermement relatif qui les a exclus d’une certaine modernité, et en fin de compte paupérisés. On peut déplorer par exemple la grande dépendance des villageois à l’égard des aides sociales, le manque d’équipements collectifs (en particulier dans le Sud), ou encore le faible accès à la pleine citoyenneté. De fait les villages sont souvent devenus des circonscriptions d’exercice du clientélisme local, et nombre de chefs coutumiers acceptent sans scrupule le rôle assigné de propagandiste du maire en place.


Une situation foncière particulière en Guyane française


L’Etat, propriétaire de l’essentiel du foncier en Guyane

C’est l’Etat qui est propriétaire des terres de Guyane (selon la doctrine des terres sans maître). La situation n’est cependant pas homogène sur le territoire : sur l’étroite bande littorale, la propriété foncière est assez largement partagée entre l’Etat, les collectivités territoriales et les personnes privées. Mais le reste du territoire appartient au domaine privé de l’Etat (90 %).

L’Etat cède volontiers des parcelles aux collectivités territoriales selon leurs besoins et sur la base de projets d’équipement. Les attributions foncières se font également aux personnes privées (concessions et cessions de terrains) selon une procédure de droit commun.


La situation foncière des communautés traditionnelles - un droit inappliqué

Les communautés traditionnelles bénéficient, elles, de dispositions particulières. Il s’agit des décrets de 1987 inscrits au Code des domaines de l’Etat. Cette politique fait suite au mouvement revendicatif de 1984, animé par l’Association des Amérindiens de Guyane française (rassemblement d’Awala-Yalimapo).

En résumé :

- les communautés peuvent être bénéficiaires de Zones de droits d’usage collectifs (ZDU) pour l’exercice des activités traditionnelles, prises sur le domaine privé de l’Etat ;

- regroupées en associations, elles peuvent être attributaires de parcelles en concession prises sur le domaine privé de l’Etat ; ces concessions peuvent faire l’objet d’une cession à titre gratuit (les communautés deviennent ainsi propriétaires de leur terre via une association) ;

- pour la réalisation de ces opérations, le maire de la commune concernée est consulté dans le cadre d’une commission ad-hoc.


Quel est l’état actuel des attributions foncières au profit des communautés ?


En ce qui concerne les zones de droits d’usage, on constate qu’une première action d’attribution s’est faite en 1991-1995 ; depuis, il n’y a pas eu de réponse aux demandes des communautés.

En ce qui concerne les cessions de terre, très peu de communautés en sont bénéficiaires (essentiellement les trois communautés Lokono - Arawak).

De nombreuses communautés sont en situation de précarité foncière, en particulier les communautés du grand Sud de la Guyane, dont aucune n’est propriétaire.



La terre de Guyane, un fort enjeu politique et une source de dissensions


Le contexte historique et administratif, ainsi que les aspirations politiques ont fait de la question foncière un objet de polémiques et de dissensions, autant vis-à-vis de l’Etat qu’au sein même de la Guyane.


Un différend entre les collectivités territoriales et l’Etat


L’Etat est donc propriétaire du foncier ‘libre’ de Guyane. Ce qui signifie que les communes, le département ou la région doivent demander à l’Etat les parcelles nécessaires à l’élaboration de projets, au cas par cas. Cette situation qui constitue une complication administrative, est vécue par les élus et les politiques comme une vexation, et bien souvent dénoncée comme une survivance de l’époque coloniale. Elle est donc une source de ressentiment.

Or en Guyane, la question de l’autonomie a été posée. Même si la consultation du 10 janvier 2010 n’a pas abouti à un changement statutaire, la plupart des formations politiques considèrent l’avenir dans une perspective d’autonomie relative : décentralisation poussée, rejet du contrôle de légalité, et enfin : réappropriation du foncier. La demande de restitution du foncier de l’Etat aux collectivités territoriales est la revendication régulière de la plupart des formations politiques.

Mais surtout la mobilisation politique à tendance identitaire, ces dernières années, a renforcé le sentiment patrimonial des politiques vis-à-vis de la terre, et en même temps a accentué la tension sur la question foncière.


La forte réticence des municipalités à l’égard des décrets fonciers


La réglementation foncière propre aux communautés  a été décidée par l’Etat qui agit sur son domaine privé. Dès 1995, l’Etat a accordé des Zones de droits d’usages collectifs et un certain nombre de concessions ont été attribuées par la suite. Cependant pour la mise en œuvre de l’application du décret et le passage à la propriété, l’Etat demande l’approbation des maires des communes à l’occasion de la réunion d’une commission foncière.

L’expérience montre que les communes n’ont jamais vraiment accepté le décret foncier. Au village Balaté, la cession de 27 hectares de terre à la communauté arawak en 1998 crée un conflit aigu avec la municipalité, dont les effets sont encore sensibles aujourd’hui ;  sur le reste du territoire, plusieurs demandes de Zones de droit d'usage restent encore en attente aujourd’hui. Sur la commune d’Iracoubo.

Accorder un territoire délimité à une communauté, parfois au sein même d’une agglomération, pose un problème aux élus locaux (certains évoquent même une ‘balkanisation’ de la Guyane).

Les politiques du Guyane expriment régulièrement une revendication identitaire vis-à-vis de l’Etat. Mais ils dénient cette même revendication lorsqu’elle émane des communautés  autochtones. Il s’est progressivement créé une doctrine politique assimilationniste destinée à déjouer toute revendication des populations autochtones : on a ainsi confectionné le sigle ABC (pour Amérindiens, Bushinengue, Créole, pris comme les trois communautés de base de Guyane), et on évoque couramment le ‘peuple guyanais’ dans un esprit finalement très jacobin.


Au sein des communautés : malentendus et opportunismes


Les communautés sont loin d’être des modèles d’unité. En même temps que l’autorité du chef coutumier se perd au fil du temps, les villageois sont de plus en plus fortement incités à se détourner des modes de vie communautaires. L’idée de la propriété individuelle gagne progressivement des adeptes, ce qui crée de fortes tensions au sein des villages, et affaiblit la revendication pour la terre collective. D’ailleurs, par effet du déclin de la cohésion coutumière, de nombreux villages sont déjà devenus des cités urbaines ordinaires ou sont amenés à le devenir.

Cette division au sein des villages est facilement exploitée par les élus qui se méfient du regroupement communautaire, surtout lorsqu’il ne sert pas leurs intérêts politiques.



Le Parc amazonien, un nouveau contentieux


En 2007, dans la zone sud de la Guyane ravagée par l’orpaillage illégal, l’administration crée le Parc amazonien de Guyane. Ce projet se conformait à la nouvelle réglementation concernant les parcs nationaux, qui prévoit en particulier de concilier la protection de l’environnement et le soutien à l’activité humaine. Sur la circonscription du parc sont établies des communautés de noirs-marrons et des communautés amérindiennes : Wayana, Emerillons et Wayampi. L’administration avait pris soin de constituer un comité de pilotage et de rassembler les avis des populations. Pure formalité que ces multiples réunions de consultation où, les comptes rendus en témoignent, les amérindiens ne s’exprimeront jamais que sur des détails (le droit de chasse et de pêche leur est acquis d’emblée), incapables de prendre la mesure d'un projet qui les dépasse.

A aucun moment il n’est débattu de l’appropriation du sol, de l’éradication préalable de l’orpaillage, de la mise à niveau préalable des services publics, de la création de communes. Le 27 février 2007, le Pays indien devient le Parc amazonien de Guyane, les communautés renonçant à l’administration de leur propre territoire.

Le Parc comprend deux zones : la zone de cœur du parc, inhabitée, vouée à la protection de la nature, et la zone de libre adhésion, périphérique, où se trouvent les lieux habités. Dans la zone d’adhésion, la loi prévoit qu’à l’issue d’un processus de concertation, une charte sera établie qui définira les activités envisageables. Les objectifs de la charte sont louables : préserver le patrimoine naturel, pérenniser des activités traditionnelles des communautés, lutter contre l’orpaillage illégal, valoriser la transmission des richesses culturelles, améliorer la qualité de vie et instaurer un développement adapté au contexte local.

A l’issue d’une enquête publique, le Conseil d’administration du Parc adopte la charte du Parc amazonien le 18 avril 2013, avec une large majorité. Aussitôt se crée un collectif de lutte contre la charte, à l’initiative non pas des communautés, mais d’une partie de l’élite politique locale – l’élite créole du littoral. Pour résumer, l’Etat est accusé de vouloir accaparer le territoire et ses ressources aurifères en le maintenant sous statut spécial. Le projet de l’élite politique, ce n’est pas la protection de la nature, c’est de ‘désenclaver’, de réaliser un maillage routier du territoire, afin de développer le pays au moyen de ses richesses minières. Cette vive opposition à la Charte a fait l’objet d’une promotion très forte dans les médias de Guyane.

Après le renoncement des communautés, le Parc amazonien de Guyane est devenu la nouvelle pomme de discorde entre l’Etat et les promoteurs d’une Guyane autonome vis-à-vis de la France, mais assimilationniste vis-à-vis des peuples de Guyane.



Conclusion


La question du foncier est plus que jamais marquée par l’incertitude, du fait des antagonismes idéologiques difficilement surmontables. D’autant qu’une prochaine réforme administrative va créer une nouvelle collectivité territoriale de Guyane, qui aura des nouvelles visées et prérogatives en matière de foncier.

Les communautés autochtones quant à elles ont échoué à créer un rapport de force politique indispensable pour peser dans les négociations passées et futures.

Brigitte Wyngaarde

mardi 30 juillet 2013

In memoriam Paule

"Ce qui donne un sens à la vie donne un sens à la mort."
Antoine de Saint Exupéry

Paule Decrette nous a quitté

Les moutons paresseux, Aï et Unau de la forêt Guyanaise doivent observer dans le ciel une nouvelle étoile qui au dessus de la canopée continue à veiller tendrement sur eux...

Paule et un de ses  protégés, un jeune paresseux Aï soigné au Centre "Chou Aï", Pointe Macouria

Paule Decrette, Présidente de l'association Chou Aï, a été emportée par la Camarde au terme d'un ultime et long combat que le destin lui a imposé... Cette femme exceptionnelle, infatigable dans sa passion des moutons paresseux, bradypus tridactylus appelé "Aï" et choloepus didactylus dit "Unau", mammifères étonnants, véritables emblèmes de cette forêt aussi majestueuse que fragile, nous laisse une oeuvre immense dans le domaine de la protection de la Nature et aussi dans celui de la générosité humaine...

Car nous perdons avec Paule beaucoup plus qu'une amoureuse de la Guyane, c'est une amie qui est partie trop tôt rejoindre son petit protégé "Chouchou", bébé Aï recueilli en 1999 en compagnie de Michel et qui va faire basculer leur vie au service de ces étranges et attachants animaux.

Commence alors un combat quotidien pour le couple : plus de dix années d'un long parcours semé d'embûches tendues par la réglementation, les institutions locales et certaines mentalités xénophobes... 

Mais Paule et Michel portés par leur amour de la vie ne baisseront jamais les bras, et l'association "Chou Aï" va devenir rapidement un centre de soin réputé, référence pour l'étude et la protection des moutons paresseux de la forêt tropicale.

Sans moyens, l'association est animée par de nombreux bénévoles qui recueillent, soignent et relâchent les animaux. Le sauvetage, les soins, mais aussi la cueillette de l'alimentation demandent une disponibilité quotidienne et fatigante.  


Le centre installé Pointe Macouria (après le pont de Cayenne en direction de Kourou) devient une véritable "Arche de Noë" poussée par les vents de la gentillesse et de la passion, et Paule en est l'âme et le Capitaine. 

Enfin, le centre est officiellement reconnu en 2011 et ouvert au public  qui peut alors découvrir (les mercredis et jeudis après midi) ces animaux doux et pacifiques avant leur retour sous les hautes frondaisons de la forêt loin de la folie des Hommes...

Paule nous te remercions pour ta gentillesse et ton dévouement, tu es restée au coeur des combats engagés debout et souriante jusqu'au dernier souffle, et je tiens ici a saluer ton coeur généreux et ton courage exemplaire. 

Ce soir je ne suis plus triste mais heureux et fier de t'avoir rencontré, et sois assurée que Chou Aï continuera à vivre, et à donner l'exemple, car tu es toujours vivante dans le coeur de chacun...

Je suis sûr que la Grande Déesse Mère Freyja aura fait dresser un grand banquet d'honneur pour t'accueillir accompagnée de ses chats "Tendresse" et "Amour maternel"...

Erwan Castel, Cayenne le 29 juillet 2013



Pour aller sur le site de "Chou Aï", le lien ici : Association "Chou Aï"
Pour contacter l'association "Chou Aî" : decrettepaulette@wanadoo.fr

dimanche 7 juillet 2013

Rencontre venue du fond des âges...

Le caïman gris...
Caïman gris sur la crique Balata, près du camp Cariacou, le 5 juillet 2013
La Nature semble aux aguets, comme s'il s'agissait d'un événement inconnu et nouveau... elle semble retenir son souffle entre les griffes de la nuit agonisante et la promesse du jour à venir. L'aube tel un peintre timide dessine peu à peu les silhouettes sylvestres échevelées penchées vers l'eau noire que rident des bois échoués...

Au détour d'un méandre, un brandon s'est allumé sur l'eau, il glisse dans l'obscurité bruissonnante, suivi de son reflet fidèle. Ma pagaie cachée dans le profond silence de l'eau propulse le canoë vers la bête qui vient de s'immobiliser, attentive à son instinct et à l'environnement qui brusquement a changé autour d'elle...

La silhouette du crocodilien progressivement colore le halo pâle de ma lampe. curieux et méfiant à la fois, le caïman sort de l'eau et de la préhistoire, pour un face à face pacifique et respectueux...

Voilà une journée qui commence bien !...

Les Crocodiliens

Seuls survivants, avec les oiseaux du clade des Archosauriens (Crocodiliens, dinosauriens et Ptérosaures) les crocodiliens apparaissent sur terre au Trias ancien, il y a 250 millions d'années. A l'époque ils sont présents sur toute la surface des terres et des océans.
Particulièrement résistants et adaptés à leur environnement, des espèces de crocodiliens vont traverser les trois dernières grandes extinctions biologiques survenues depuis leur apparition.

Aujourd'hui, leur ordre est représenté par 23 espèces réparties dans 3 familles :
- La famille des Crocodylidae ( 4 genres, 13 espèces )
- La famille des Gavialidae (1 genre, 2 espèces)
- La famille des Alligatoridae (4 genres, 8 espèces)

La répartition géographique est aujourd'hui limitée à la zone intertropicale, sur tous les continents, une seule espèce marine (crocodylus porosus) a survécu jusqu'à nos jours entre l'Australie et le Sud Est asiatique.

Les Alligatoridae

Dans la famille des alligatoridae il fat distinguer deux aires géographique majeures :
L'hémisphère Nord ou vivent 2 espèces appartenant au même genre :
- Le genre Alligator avec l'alligator du Mississipi et l'alligator de Chine
L'hémisphère sud où sont répartis exclusivement les 3 autres genres :
- Le genre Caïman (caïman crocodilus, caman¨latirostris et caïman yacare)
- le genre Melanosuchus (melanosuchus niger)
- le genre Paleosuchus (paleosuchus palbebrosus et paleosuchus trigonatus)

Les 8 espèces d'alligatoridae vinant en Amérique du Sud et Amérique centrale sont communément appelés "caïman" nom emprunté à la langue amérindienne caribe.

Le Caïman gris
Caïman gris sur la crique Balata, près du camp Cariacou, le 5 juillet 2013
Les deux espèces de paleosuchus très semblables dans leurs apparences et comportements sont vraisemblablement parmi les plus anciennes espèces de crocodiliens ayant traversé les âges jusqu'à nous (mais réussiront-ils à nous survivre ?)

TAXONOMIE:
Nom scientifique... "Paleosuchus triganotus"
Nom français.........."caïman gris" ou "caïman hérissé" ou "caïman de Schneider" 
Nom créole............."caïman à front lisse" (avec le Caïman rouge) ou "caïman roche"
Nom wayampi........"Yakaleti"
Nom sranatongo...."Bergikaaiman"
Nom anglais..........."Schneider's dwarf caïman"

DESCRIPTION:
Le Caïman gris est un petit crocodilien dont la biométrie adulte moyenne se situe entre 1,3 m pour la femelle et 2.3 m pour le mâle. Massif, il est revétu d'un cuir épais et durci muni de plaques osseuses, notamment sur la tête.
Les deux mâchoires sont claires et  tachetés sur leurs côtés. 
Entre les pattes arrières les quatre rangées d'écailles dorsales connaissent un rétrécissement.
L'écaille située devant le conduit auditif (derrière les yeux) est de couleur noire.

RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE :
Le caïman gris est une espèce vivant à proximité des criques (rivières) forestières reculées. pendant la saison des pluies, il peut descendre les cours d'eau jusqu'aux grands fleuves et savanes inondées. 

BIOLOGIE
Solitaire, le caïman gris comme son cousin le caïman rouge vit sur les berges des rivières, caché dans un terrier en journée et à la recherche d'invertébrés et de vertébrés terrestres  et aquatiques pendant la nuit.
Cet alimentation diversifiée l’amène souvent à s'éloigner des berges où il vit et il n'est pas rare de croiser les espèces à front lisse sur les crêtes des collines...

REPRODUCTION
L'accouplement est la seule relation que ce solitaire entretient avec ses congénères. La femelle vient alors pondre dans le sous bois entre 20 et 30 œufs  et près d'une termitière qui lui apporte la chaleur nécessaire à l'incubation qui dure 3 mois (entre 28 et 32°). Les oeufs son répartis de l'intérieur à l'extérieur autour du point des 31° qui détermine le sexe des petits (femelle jusqu'à 31° et mâle au delà)

Contrairement à la plupart des autres espèces de caïmans, la femelle ici reste à surveiller son nid qu'elle vient ouvrir à l'appel des petits juste éclos;  avant de les transporter jusqu'à la rivière parfois éloignée.

PROTECTION
Afin de limiter la pression cynégétique importante à la seule activité d'auto-subsistance, sa chasse commerciale de cette espèce a été interdite. Elle est donc inscrite à l'annexe II de la Convention de Washington (CITES).


Revêtu de l'invisibilité de sa patience, sur la berge, le Caïman se fait roche immobile jusqu'au moment où...


lundi 1 juillet 2013

Histoire d'un conflit caché

Un nouveau blog est né, 
dédié à l'information et la vérité 
sur l'orpaillage en Guyane


En préambule...

Mon intention initiale était de consacrer une page de ce présent blog à l'orpaillage en Guyane. mais devant la recrudescence dramatique de cette activité aux multiples impacts destructeurs sur l'environnement et les populations traditionnelles de Guyane, je me suis décidé a lui consacrer un espace spécialisé où les lecteurs trouveront une compilation de documents commentés d'articles consacrés et d'analyses réalisées.

Sur la page "Orpaillage" de ce blog, vous serez informé des publications réalisées sur le blog  "alawata-orpaillage". 

En vous remercient de votre collaboration et soutien
Erwan Castel

Publié le 30 juin 2013 sur le lien: Alawata-orpaillage

"Vitam impendere vero"

Un conflit meurtrier, 
caché par la forêt amazonienne et la jungle politique...

L'activité minière aurifère, déclarée ou illégale, est présente en Guyane Française depuis 1855, et tel un serpent de mer, elle resurgit tout au long de l'Histoire de ce territoire couvert à 90% par la forêt amazonienne...

Depuis 10 ans, favorisé par la mécanisation, le prix élevé de l'or, et l'immensité du territoire "l'orpaillage" s'est développé en Guyane, jusqu'à devenir un problème majeur pour l'environnement, et la sécurité des populations vivant en milieu isolé. 

Les mesures prises par l'Etat se révèlent souvent insuffisantes, les procédures législatives et tactiques imposées peu dissuasives, et les "garimpeiros" (nom donné au chercheur d'or brésilien) sont aujourd'hui plusieurs milliers a piller la forêt. 
De plus, ces clandestins évoluent dans leur organisation et leur mentalité, et ils n'ont ni scrupules ni contraintes, organisant en forêt un réseau délétère de mines, villages, et voies logistiques où la violence est chaque jour plus importante et meurtrière...

Aujourd'hui le "jeu du chat et de la souris" entre forces de l'ordre et clandestins est terminé, l'évolution des enjeux et des menaces amène à une radicalisation des comportements et  depuis plusieurs mois, l'affrontement est devenu direct et meurtrier....

Il y a tout juste 1 an,  l'adjudant Moralia et le caporal chef Pisot tombaient dans une embuscade à Dorlin, en plein coeur d'un département français ! Avant eux, nos forces armées avaient déjà perdus des gendarmes, tués ou grièvement blessé par balles, et essuyés souvent des tirs lors d'opérations menées en forêt. Et je ne compte pas ici la liste interminable des clandestins tués, blessés ou disparus...

Mais je m'interroge...

Car à l'heure où la France intervient en Afghanistan, en Libye, au Mali... affrontant avec vigueur des groupes puissamment armés,  ici en Guyane, depuis plus de 10 ans, elle retient ses coups légitimes, préférant sacrifier un environnement et des populations. 
Il est vrai que les villages de Guyane qui ne pèsent pas lourds devant les intérêts économiques, ou géostratégiques que la France ambitionne dans cette région d'Amérique du Sud. 

Dans ce blog je veux rassembler des analyses, des documents et des témoignages permettant de mieux connaître et essayer de comprendre cette guerre de basse intensité qui laisse des sillons ensanglantés au cœur d'une des dernières forêts tropicales de la planète  dont nous sommes les gestionnaires devant nos enfants... 


Erwan Castel, Cayenne le 30 juin 2013

"Vitam Impendere Vero"
Juvenal (poète et philosophe romain du 1er siècle) 

samedi 29 juin 2013

Le masque tombe...

Publié le 29 juin 2013 sur le blog :Cayenne

Alerte sur Cépérou, épisode 2 :

Quand la mauvaise foi danse avec l'arrogance !



Résumé : 
Le 9 juin 2013, je me laisse aller à un "Coup de gueule" au sujet du fort Cépérou, site historique parmi les plus anciens de Cayenne, et pierre d'angle de sa beauté paysagère.. Cet article à été repris le 19 juin 2013, dans un "courrier des lecteurs" du quotidien local France Guyane... Piquée au vif dans ce qu'elle a de plus cher, à savoir son image médiatique, le maire de Cayenne, Madame Phinéra-Horth, enfin, a réagit après six mois d'inertie silencieuse dans le même quotidien, le 29 juin 2013. 
Sa réaction, pour le moins viscérale est toutefois intéressante car elle laisse transpirer une mentalité d'oligarque communautariste où la xénophobie resurgit à la moindre critique. 
En effet derrière une argutie fallacieuse où les droits d'aménagement sont allègrement confondus avec les devoirs d'entretien du fort, Madame le Maire qui cherche à se défausser vers les services de l'Etat, exprime dans un style voilé par la lâcheté son regret de ne pouvoir recourir au bannissement de l’importun que je suis....
Pendant ce temps là le fort continue de s'écrouler...

Pour lire la suite : Le masque tombe...

dimanche 23 juin 2013

Retour sur un solstice

22 juin 2013

Voilà un solstice d'été passé loin de cette pauvre place des Palmistes prise en otage par  une "fête de la musique", aux vociférations sincèrement haineuses et faussement musicales beuglées par des paumés en quête d'identité et gesticulant sous des casquettes à l'envers.

Avec un petit groupe de stagiaires finissant une formation en Tourisme Vert, nous sommes allés sous les frondaisons de la forêt guyanaise écouter la vraie musique, celle de la nature et des étoiles...

Cette belle journée solsticiale, placée sous le signe et la présence de notre étoile, fut riche de belles rencontres, tant naturelles qu'humaines, dans l'harmonie du monde et le secret de la nature... 

Louis, l'âme du camp Cariacou
La journée solsticiale commença au camp Cariacou de Thomas Saunier. Dans ce camp magnifique au coeur de la forêt, la forêt nous réserve un accueil coloré et chaleureux, autour de Louis, un guide amérindien, dont la gentillesse et le sens du partage nous plonge simplement et en profondeur dans l'harmonie avec la Nature... Je n'oublie pas ici de remercier tout autant Sako et Alain, animateurs saramakas aux qualités humaines aussi grandes que discrètes....

Les découvertes et les activités s'enchaînent ici au rythme de la nature, dans une éloge de lenteur attentive et de beauté jamais interrompues. 

L'Homme ici, est à l'écoute des autres, de l'environnement et de lui même....

La Nature sait récompenser ceux qui écoutent et regardent avec respect et humilité, et sous notre étoile célébrée, un festival de couleurs vint animer la journée 

Ainsi, dans le patchwork des verts de la sylve amazonienne, les Boas de Cook, papillons multicolores, toucans, fleurs écloses, singes et moutons paresseux, apportèrent leurs touches lumineuses et variées, comme pour participer à cette communion primordiale...

Puis la pirogue, glissant dans les méandres du fleuve Kourou, sous le regard curieux et méfiant des singes hurleurs et des paresseux, nous ramena vers la route moderne, grâce à laquelle nous avons rejoins l'Auberge de la Crique Grand Laussat où nous attendait la famille Rube pour la fin de cette longue mais agréable journée...
Le soir, le décor est planté, une table d'hôte ruisselante de mets et de fruits, une crique dispensant sur les carbets la quiétude d'une forêt accueillante, les belles rencontres entre voyageurs autour de la gentillesse sincère et naturelle de Maud et Christophe...

Sans oublier Dame la lune qui de son œil unique et étincelant,prolongeant l'ardeur de son frère le Soleil, nous éclairait de sa lueur étincelante révélant la nature environnante jamais assoupie...

Ce soir là, 21 juin, la Lune prolonge l'éclat de son frère le Soleil !
Car si il est des moments privilégiés pour  célébrer la Nature, ce sont bien les solstices, ces fêtes du Soleil qui marquent les journées les plus courtes (solstice d'hiver) ou les plus longues de l'année où, ce 21 juin, l'astre y brille dans sa plus longue orbe.  
Autrefois, dans leurs diversités respectives, les Hommes célébraient à l'unisson cet événement astronomique, de la danse du soleil des indiens lakota aux feux de la Saint Jean; et les peuples depuis la nuit des temps ont conservé la tradition cette journée sacrée.

Car le Soleil, incarne la vie et les cycles de la Nature, il est la puissance originelle de l'existence, et même le sage chrétien Saint François d'Assise l'avait compris : 

"Loué sois tu Dieu, mon Seigneur, 
à cause de toutes les créatures,
Et singulièrement pour notre frère Messire le Soleil, 
Qui nous donne le jour et la lumière !
Il est beau et rayonnant d'une grande splendeur,
Et il rend témoignage de Toi, Ô mon Dieu !
Loué soyez-vous, mon Seigneur, 
pour notre sœur la lune et pour les étoiles ! 
Vous les avez formées dans les cieux, claires et belles"

Saint François d'Assise , extrait du cantique des créatures, 1225

Les populations, conscientes de cette vérité continuent l'adoration de l'étoile, consciemment ou inconsciemment, et ce malgré les tentatives de récupération ou de détournement des rites anciens.

Ainsi les solstices d’Été et d'Hiver devinrent-ils, dans le calendrier chrétien, les fêtes des deux Saint Jean. Les chrétiens s'attachèrent ainsi a donner au Christ ("né" le 25 décembre) une dimension solaire, par Jean le Baptiste (24 juin) d'une part, qui annonce l'arrivée du nazaréen, et Jean l’évangéliste (27 décembre) d'autre part, qui annonce son retour. 
Il faut noter ici que l'Eglise chrétienne primitive, sans le reconnaître explicitement bien sûr, "récupère" cette réalité mystique des cycles naturels solaires : en effet, le solstice d'Hiver (vers le 24 décembre) cette journée la plus obscure de l'année annonce le début de la phase lumineuse, et le solstice d’Été, journée la plus lumineuse, quant à lui, annonce la phase d'obscurité à venir...Ainsi, le personnage du Christ que l'on représente initialement dans l'art roman, non en crucifié mais en majesté dans un mandorle solaire, ne dit-il pas justement : "Il faut que lui grandisse et que moi je décroisse" (St Jean, 3/30)

Ainsi est le paradoxe de cette religion intolérante et meurtrière appuyant sa légitimité et sa symbolique sur la récupération des rites et des cultes des religions anciennes qu'elles va tenter de détruire durant des siècles... Il en est ainsi des fêtes solsticiales, tradition sacrée qui reste vivante au secret des religions nouvelles. Mais je reconnais aux "Pères de l'Eglise" une certaine sagesse et intelligence (cela dit très commerciales) d'avoir su, tout en les niant officiellement,  respecter les cycles anciens.

Car on ne peut fermer les deux portes de Janus, l'obscure et la lumineuse, ces marqueurs naturels des cycles immuables de la vie... Et cela dérange le Moderne, cet orgueilleux qui refuse de reconnaître sa dépendance à la Nature... 
Alors,  il défigure d'abord les fêtes païennes, mais elles résistent toujours comme la racine qui fend la pierre, à travers les feuilles du sapin honorées et décorées au solstice hivernal ou les danses illuminées par les feux du solstice estival.

Les Feux de la Saint-Jean d'après Jules BRETON Photogravure - 1891

Puis dans un deuxième temps, pour tenter une nouvelle fois de détruire ces forces naturelles qui imposent le respect et l'humilité, les incultes veulent aujourd'hui les détourner dans le consumérisme... C'est ainsi que pour beaucoup, le solstice d'hiver, devenu Noël avec le chrétiens, n'est plus aujourd'hui qu'une fête commerciale aux cadeaux obligatoires et futiles, et que le solstice d’Été, cherche à être est réduit à cette "fête de la musique", superficielle et consumériste... 
La même démarche est observable concernant Sahmain, devenue Toussaint puis Halloween !

Alors  n'en déplaise aux thuriféraires de Jack Lang, je ne céderai jamais aux modes de cette société de "consumation" qu'ils cherchent à nous imposer mondialement, pour détruire les racines qui jugent leurs frasques imbéciles et leurs pouvoirs illégitimes...
Ma musique est celle de mes ancêtres, et de cette terre pour laquelle ils se sont aimés et parfois battus, pour nous transmettre l'amour et le respect de la Vie.

Les feux de la Saint Jean s'allumeront toujours les sommets des collines et au secret de nos coeurs !


Erwan Castel, Cayenne le 22 juin 2013
  


jeudi 20 juin 2013

Le Grand Tamanoir

La grande langue !

Merci à Daniel Bergeron d'avoir fait partagé cette  belle et rare rencontre avec un Grand Tamanoir !


Grand Tamanoir nageant
Le Tamanoir (Myrmecophaga tridactyla), est une des espèces emblématique de la forêt amazonienne, ce mammifère est  le plus grand représentant de la famille des fourmiliers.

Très discret, on le rencontre qu'exceptionnellement malgré une aire géographique étendue, allant des savanes aux forêts tropicales élevées. appartenant à l'un des plus anciens groupes de mammifères de la planète, l'ordre des Édentés xénarthres (qui comprend également les tatous et les moutons paresseux), le grand tamanoir est une espèce qui est en danger d'extinction et est inscrit aujourd'hui sur la liste rouge de l'IUCN . En Guyane, le tamanoir est inscrit à l'article 1 de la convention CITES (Interdit à la chasse, au transport , à la capture et au commerce) depuis le 15 mai 1986.

Description

Tamanoir au zoo de Macouria (Guyane)
Le tamanoir adulte mesure environ 2 mètres pèse entre 20 et 50 kilos. 
Sa silhouette est très caractéristique, car elle dispose à l'arrière d'une grande queue en panache, qui peut atteindre près de 90 cm et lui et de couverture camouflée lorsqu'il dort. A l'avant un très long museau légèrement recourbé à l'intérieur duquel une langue immense d'environ 60 cm.
De couleur beige, sa fourrure est épaisse et longue, munie de poils rêches. Une "gilet" noir frangé de blanc couvre de poitrail et se prolonge sur les flancs.
Ses oreilles sont petites et rondes, comme ses yeux.
Les membres antérieurs sont puissants et dotés de griffes importantes dont la troisième dépasse les 10 cm, ses griffes, en position de repos sont repliées contre la paume la face externe de la main servant d'appui pendant la marche qui et lente et chaloupée. .

Aire géographique et territoire

Présent dans toute l'aire amazonienne, le tamanoir est aussi signalé en Amérique centrale et sur les plaines côtières colombiennes et équatoriennes. Son territoire vital varie selon le biotope où il vit  : limité à 3 km2 en forêt il peut dépasser les 20 km2 dans les savanes.

Biologie

Le tamanoir, animal solitaire est un grand dormeur : il consacre 14 à 16 heures quotidiennes au repos réalisé dans une excavation creusée , c'est un animal diurne mais qui a su s'adapter à l'anthropisation de son biotope, adoptant un mode de vie nocturne pour éviter l'Homme. Silencieux les tamanoirs communiquent grâce aux odeurs (sécrétions et salive) Il peut vivre jusqu'à 25 ans. C'est un animal pacifique qui n'est pas territorial, aucun combat n'a été observé entre mâles ou pour défendre un espace défini.

Le tamanoir a peu de prédateur (à part l'Homme) car sa puissance et ses griffes en font un redoutable adversaire. Partout en, Amazonie, les populations forestières rapportent des description de rencontres accidentelles où le tamanoir debout en appui sur sa queue teint tête même aux grands félins tel le jaguar, et ses griffes acérées restant fermées même après la mort, le combat s'avère parfois mortel pour les deux adversaires.

Alimentation

Si il consomme des plantes, le tamanoir est essentiellement insectivore, les fourmis et les termites constituant ses proies favorites. Il est doté d'un odorat 40 fois plus puissant que celui de l'Homme, et qui lui sert à repérer ses proies dont il éventre les habitats grâce à ses puissantes griffes. Son museau pénètre alors dans les cavités des termitières et des fourmilières attaquées et son immense langue épineuse et à la salive collante fouille et récolte environ 150 insectes par prélèvement. Le tamanoir "grignote" ainsi toute la journée, avalant jusqu'à 30 000 insectes par jour, répartis sur une trentaine de sites différents. certaines espèces de fourmis, très venimeuses ou très agressives échappent à ses attaques.



Reproduction

La reproduction du tamanoir est le seul moment sociable de l'espèce et constitue la fragilité principale de l'espèce, la femelle ne donnant naissance qu'à un seul petit tous les trois ans !. La maturité sexuelle intervient entre 3 et 4 ans et lorsqu'elle est fécondable, la femelle attire le mâle via ses sécrétions odorantes. 
La gestation dure 190 jours, la femelle pour mettre bas se met debout en appui sur sa queue, et donne naissance à un petit de 1,5 kilo environ qui s'accroche à sa fourrure et y reste pendant un an ! Le sevrage intervient entre 6 et 9 mois mais l'indépendance à la mère quà partir de la troisième année.

Histoire

Parmi les voyageurs et les naturalistes qui réalisent les premières descriptions de la faune guyanaise, le chevalier des Marchais s'intéresse tout particulièrement au tamanoir dont il nous fait une description détaillée dans sa relation de voyage publiée en 1731 ("Voyage du chevalier des Marchais en Guinée, isles voisines et à Cayenne, fait en 1725, 1726 et 1727". Amsterdam, 1731 (t. III, p. 231))

Représentation du tamanoir au XVII° siècle
«On appelle à Cayenne Mange-fourmis, dit le chevalier des Marchais, un animal qu'on pourrait nommer renard amériquain, s'il ne se trouvait qu'en Amérique; mais comme il y en a en Afrique, je crois qu'il faut s'en tenir au premier nom, à moins qu'on ne veuille se servir de celui que lui donnent les Indiens, qui est bien long : ils l'appellent Tamadu Guacu ; il signifie la même chose que Mange-fourmis : c'est sa nourriture ordinaire qui lui a fait donner ce nom.

 « Cet animal est long et gros comme un chien de bonne taille. Ses jambes de derrière sont tout d'une venüc comme celles d'un ours : celles de devant sont un peu mains grosses; il a le pied plat, divisé en quatre doigts armez d'ongles longs et forts; ceux de derrière ont cinq doigts et bien armez; sa tète est longue et sort museau encore plus long et pointa ; il a des yeux petits, ronds et noirs, les oreilles fort courtes. Ceux qui ont pris la peine de mesurer sa langue disent qu'elle a deux pieds et quelque­fois davantage de longueur. Il est obligé de la plier pour la cacher dans sa gueule qui, toute longue quelle est, seroit beaucoup trop courte pour cacher ce membre. S'il parlait, il parleroit sans doute beaucoup, et on ne lui reprocheroit pas sans raison qu'il aurait la langue bien longue.

«  Il vit de fourmis. Lorsqu'il en a découvert quelque retraite, il fouille avec ses ongles pour élargir l'entrée et arriver au centre de la fourmilière, et aussitôt il y fourre sa longue langue qui pénètre dans tous les recoins de l'antre, et comme elle est onctueuse, les fourmis effarouchées et en désordre s'y attachent aussitôt, et dès qu'il la sent chargée de ces insectes, il la retire dans sa gueule et les avalle. Il recommence ce manège tant qu'il sent des insectes dans un endroit : après quoi s'il a encore faim il va en chercher un autre. Cette nourriture est légère, comme on voit ; elle ne laisse pas cependant de bien nourrir l'animal qui s'en sert, mais elle donne à sa chair une odeur de fourmis qui n'est pas agréable. Les Indiens et les Nègres en mangent ; mais les Français ont de meilleures viandes. S'ils savoient un peu mieux leurs intérêts, ils conserveroient précieusement ces animaux qui les délivreroient en tout ou en partie des fourmis qui leur causent de très grands dommages. Mes mémoires ne marquent point s'il aime autant les fourmis blanches que noires. On connoit les fourmis blanches sous le nom de Poux de bois : elles en ont assez la figure... Elles sont également malfaisantes partout. Ce seroit un bonheur extrême pour les habitants s'ils étoient délivrez de ces mauvais insectes qui sont encore plus pernicieux que les noirs. Dans ce cas il devrait être sévèrement défendu aux chasseurs de faire aucun mal au Mangefourmis-

« J'ai dit qu'on les pourroit appeler renards : c'est â leur queue qu'ils seraient redevables de cette dénomination. En effet il n'y a point un renard au monde qui ait une queue aussi souple que la leur. Elle a souvent près de deux pieds de longueur elle est presque plate et couverte de tous cotez de grands poils de quinze à vingt pouces de longueur, un peu durs à la vérité' ce qui lui donne assez l'air d'une queue de cheval. Comme elle forte et qu'il lui imprime tel mouvement qu'il lui plait, il balaye les endroits où il passe, et quand il la replie sur son dos, il s'en couvre entièrement. Elle le défend de la pluye qu'il craint beaucoup, c'est pour lui un surtout qui a son agrément et sa commodité. »